Fermez les vieilles centrales, SVP
Depuis 1996, la sureté se dégrade dans les centrales
nucléaires françaises qui ont vieilli (une vingtaine
a plus de 40 ans fin 2020), et l'entretien ou les réparations
sont à la charge de sous-traitants, dont les ouvriers précaires
ne sont pas protégés des dangers de la radio-activité
comme il le faudrait (d'après Sciences et Avenir
d'avril 1997).
Le nombre d'incidents recensés
sur les réacteurs nucléaires a beaucoup augmenté
: anomalies en série, fissurations, usure des tubes de
vapeur, dégradation de l'acier des cuves, fuites radio-actives
(plutonium détecté dans le limon de la Loire), accidents
à répétition, etc.
Jeudi 31 mars 2016, un générateur de vapeur usé
de la centrale nucléaire de Paluel (Seine-Maritime), haut
de 22 m et pesant 500 tonnes, a basculé alors qu'il était
en train d'être sorti du réacteur n°2 pour maintenance.
L'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN)
a relayé l'accident, inédit, qui a fait des blessés
parmi les ouvriers, ce n'est pas un poisson d'avril !
Les
incidents sont assez fréquents dans les centrales, comme
celle de Tricastin, mais aussi à La Hague, où les
ouvriers travaillent dans des conditions inhumaines. EDF emploie
des sous-traitants pour le démantèlement, et les
employés sont mal informés, très mal protégés
et mal considérés.
- Les cancers ne sont même pas reconnus comme maladie professionnelle
car ils sont détectés 8 ans après l'irradiation,
et au prétexte qu'il y a d'autres facteurs déclencheurs
possibles !
Le nucléaire français n'a plus le vent en poupe
depuis la faillite d'AREVA, à cause de la mauvaise gestion
d'Anne Lauvergeon (confrontée à la justice pour
l'acquisition d'Uramin). Entre les pertes liées à
Uramin, la catastrophe de Fukushima et les retards dans la construction
de l'EPR de Flamanville et d'un EPR en Finlande, le spécialiste
du nucléaire est en pleine restructuration après
cinq années consécutives de déficit. C'est
EDF qui reprend la moitié du déficit, et on pense
que le reste va peser dans les deniers publics (les contribuables
n'auront pas le choix !).
TRICASTIN cumule les incidents majeurs
Un nouvel incident sur le réacteur n°2 est survenu
en février 2019 lors de la maintenance entrainant un arrêt
des opérations et la fermeture du bâtiment de ce
réacteur. C'est la troisième fois qu'un tel incident
se produit sur la tranche 2 du site de Tricastin !
La centrale de Chinon cumule les infractions
Une
dalle en béton en train de s’effondrer située
au-dessus d’équipements cruciaux, un stockage aberrant
et dangereux de produits chimiques incompatibles, des inondations
internes récurrentes, des canalisations qui laissent échapper
des substances toxiques…
Voilà quelques-uns des problèmes (voir résumé
ci-dessous) que l’Autorité de sûreté
nucléaire avait relevés en 2013 suite à 9
inspections inopinées menées sur le réacteur
B1 de la centrale nucléaire de Chinon. Ces inspections
avaient lieu dans le cadre du contrôle des travaux destinés
à prolonger son fonctionnement au-delà de 30 ans.
Le rapport d’inspection de l’ASN évoquait
également une désorganisation manifeste des travaux
: équipes mutées d’un chantier à l’autre
sans continuité ni tuilage, dossiers d’interventions
remplis de manière désordonnée, contrôles
non effectués… Enfin, il relevait les conditions
de travail déplorables de certains travailleurs sous-traitants,
soumis à une irradiation élevée sans qu’une
protection adéquate ne leur soit fournie.
Au vu de ces négligences inacceptables, le Réseau
“Sortir du nucléaire“ avait porté plainte
contre EDF le 3 avril 2014 pour une quinzaine d’infractions
à la réglementation des installations nucléaires
de base et au Code du travail. Le Parquet a alors engagé
des poursuites contre le directeur de la centrale pour trois de
ces infractions. Afin de retenir d’autres infractions et
d’éviter que l’entreprise ne se défausse
en laissant condamner un individu à sa place, le Réseau
“Sortir du nucléaire“ a également cité
EDF devant le tribunal. L’audience aura lieu le 11 octobre
2014 à 14h, au tribunal de police de Tours, pour étudier
quatre infractions en tout.
=> Une centrale dangereuse et vieillissante à fermer
d’urgence
Ces dysfonctionnements n’ont malheureusement rien d’exceptionnel
de la part d’une centrale qui a été placée
durant cinq ans en surveillance renforcée par l’ASN
et demeure aujourd’hui «sous surveillance particulière
spécifique». Traduisant d’importants problèmes
organisationnels, ils révèlent un inquiétant
mépris tant pour la « sûreté »
que pour les travailleurs.
Dans ces conditions, la prolongation de la durée de fonctionnement
de la centrale engagée par EDF s’annonce particulièrement
mal. À ces dysfonctionnements résultant
d’une conduite chaotique des travaux [1],
va s’ajouter le vieillissement des équipements. Certains,
déjà obsolètes, ne sont pas remplacés
[2]. Par ailleurs, certains composants lourds
comme les cuves des réacteurs ne sont ni remplaçables
ni réparables. Plutôt que d’engloutir des milliards
dans le rafistolage des réacteurs, la sagesse exigerait
de fermer au plus vite cette centrale vieillissante.
Résumé des « écarts
» recensés par l’Autorité de sûreté
nucléaire dans son rapport d’inspection
-
Certains de ces dysfonctionnements ont fait l’objet
d’un dépôt de plainte pour violation de
la réglementation relative aux installations nucléaires
de base, du Code du travail et du Code de l’environnement.
Les dysfonctionnements qui seront étudiés lors
de l’audience figurent en gras.
-
Risque réel de chute d’objets non répertoriés
dans les équipements et canalisations, pouvant amener
à de graves problèmes (p.2 du rapport d’inspection)
-
Sur certains chantiers, les intervenants n’ont pas
communication de l’analyse de risques ; dans d’autres
cas, ce document ne mentionne pas certains risques comme la
présence de plomb (p.3) !
-
Non-respect du processus de consignation des équipements
et non-connaissance des procédures (p.4)
-
De nombreux intervenants ne portent pas leurs équipements
de protection individuelle (sur-tenue, cagoule) dont le port
est pourtant prescrit (p.5) !
-
Des intervenants sont confrontés sur certaines opérations
à un débit de doses de radioactivité
plus important que prévu, sans que des précautions
supplémentaires ne soient mises en place. Devant opérer
sur une vanne présentant un débit de dose très
important (en une heure, on y recevrait les ¾ de la
dose annuelle autorisée pour un travailleur du nucléaire),
un intervenant demande à pouvoir travailler avec un
tablier de plomb… qui lui est refusé par EDF
(p.5-6).
-
Stockage aberrant et dangereux de produits chimiques dans
l’atelier chaud (p.7) :
« [Les inspecteurs] ont constaté :
-
que les quantités de certains produits (…)
étaient supérieures aux quantités indiquées
sur la fiche d’identification (…),
que les acides et les bases, produits incompatibles, étaient
stockés dans une même rétention,
la présence de produits périmés que les
intervenants en charge du local de stockage ne savaient pas
gérer,
la présence de bidons avec des étiquettes déchirées
ne permettant pas l’identification des produits qu’ils
contiennent,
que la notice d’utilisation des armoires de stockage
est écrite en allemand, ne permettant pas aux intervenants
en charge du local de stockage de connaître la charge
calorifique maximale admissible par armoire »
-
Présence d’importantes quantités d’eau
dans le sous-sol du bâtiment réacteur, dans l’indifférence
générale et sans qu’aucune analyse attestant
l’absence de contamination n’ait été
effectuée. Cette présence d’eau atteste
de l’absence de mesures pour collecter des effluents
potentiellement radioactifs. La zone a ensuite été
balisée… sans vérifier l’absence
d’intervenants dans la zone du balisage, si bien que
plusieurs d’entre eux, dont les inspecteurs, se sont
retrouvés piégés à l’intérieur
(p.7).
-
Remplissage désordonné ou lacunaire des dossiers
d’interventions, conduisant à plusieurs reprises
à l’oubli de certaines phases de maintenance
(p.8).
-
Des ordres d’interventions où manquent certains
éléments capitaux :
-
« …les phases de relevé des côtes
initiales et les réparations éventuelles n’étaient
pas indiquées. Seul le professionnalisme des intervenants
permettait de garantir la réalisation de ces phases,
sans qu’aucune ligne de défense ne permette de
s’affranchir d’un oubli éventuel »
(p.9).
-
Suite à la réalisation de certaines interventions
sur une vanne, une opération de contrôle n’a
pas été effectuées par les sous-traitants
alors que le protocole le prévoyait pour garantir une
traçabilité de cette opération (p.10).
- Présence le long d’une canalisation d’importantes
traces de bore, produit chimique destinée à contrôler
les réactions en chaîne et considéré
par la réglementation européenne REACH comme «
une substance hautement préoccupante en raison de ses propriétés
reprotoxiques ». Ces infiltrations démontrent l’absence
d’étanchéité des éléments
de tuyauterie. Or un tel problème avait déjà
été signalé en 2012 et n’avait apparemment
pas été traité (p.10)
Découverte dans le bâtiment réacteur, à
deux mètres de hauteur, d’une dalle de béton,
« en train de s’effondrer », située au-dessus
de « matériel important pour la sûreté
» (p.11).
Équipes permutées en dépit du bon sens,
sans continuité et avec un risque de mauvaise circulation
de l’information :
« … le chargé de travaux a indiqué
ne pas avoir participé à la réunion de levée
des préalables du chantier. (…) les agents ayant
réalisé la préparation de l’activité
et participé à cette réunion n’étaient
plus disponibles pour poursuivre l’intervention (…)..
Par conséquent, une nouvelle équipe, n’ayant
participé ni à la préparation de l’activité
ni à la réunion de levée des préalables
du chantier, avait repris l’activité pour achever
la réalisation de cette intervention ».
Conditions d’interventions « particulièrement
difficiles » sur deux chantiers : « à même
le sol, dans un espace très réduit dans lequel se
déroulaient par ailleurs plusieurs autres activités
de maintenance, avec une ambiance radiologique importante »
; « avec une très importante coactivité, un
manque de place pour les intervenants ainsi qu’un manque
d’éclairage » (p.13).
« Appareils de mesure non étalonnés ; zone
contaminée non délimitée » (p.14).
Mais Antoine Ménager, directeur
en poste depuis janvier 2018 à EDF, veut encore prolonger
la centrale de Chinon 20 ans de plus (au delà des 40 ans)
pour exploiter les réacteurs jusqu'à 60 ans.
Le retraitement des déchets n'est qu'un pis-aller :
Proposition
de loi pour la sortie du nucléaire et le développement
des énergies renouvelables
(La France Insoumise)
Note [1] Ces problèmes organisationnels
n’ont pas cessé, comme en témoignent d’autres
lettres d’inspection rédigées ultérieurement
: «… les inspecteurs ont constaté un certain
relâchement concernant la qualité des dossiers d’interventions
présentés (analyses de risques non homogènes
sur des chantiers identiques, dossiers de suivi d’intervention
incomplètement renseignés, régimes de travail
radiologiques incomplet...) » (lettre du 30 juillet 2015)
; « la gestion des dossiers de suivi d’intervention
doit être plus rigoureuse » (lettre du 4 juillet 2016)…
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Note [2] Faits cités dans un article
du Figaro
Pour en savoir plus, voir le dossier de plainte : http://www.sortirdunucleaire.org/Chinon-inspections
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